Vendredi 3 août 2018
Je suis donc arrivée en Macédoine, à Skopje hier sur les coups de 13h. J’ai pris un taxi pour me rendre jusqu’au AirBnB que j’ai loué pour les trois jours qui viennent. J’avais envie d’être un peu seule, de sortir et rentrer quand je veux et surtout de dormiiiiiiiiiiiir. Le taxi m’a passablement arnaquée (j’ai facile payé le double du prix réel de la course mais je m’en remettrai et ça m’apprendra à pas vouloir marcher). Je retrouve Labina en bas de l’immeuble, elle me montre l’appart, super mignon et très confortable. Je me pose un moment, car je n’ai toujours pas plus de 3 heures de sommeil au compteur et qu’il fait chaud. Je descends à la supérette du coin acheter de la lessive pour profiter de la machine à laver et je pars chercher un truc à manger. J’ai appris par le voleur, pardon le chauffeur de taxi, que c’est un jour de fête nationale et que pas mal de trucs sont fermés (effectivement, il n’y a personne dans les rues et presque tout est fermé). Arriver dans une ville un jour férié n’est jamais le truc le plus excitant mais à l’heure qu’il est, la seule chose qui m’enthousiasme est la vue de mon lit double méga confortable donc c’est pas un drame. Je dégote une boulangerie plutôt alléchante, un genre de burek plus brioché que les autres, un jogurt, un Mars glacé dans un genre de trafika et ayant fait le plein de calories pour la journée, je décide de rentrer (un orage menace).
J’en profite pour vous partager mes réflexions de ces derniers jours. Clairement, entre le nord de la Serbie (tout particulièrement Subotica) et le Kosovo, on a changé de monde. Le niveau de développement a grandement chuté. Deux indices : les déchets et les animaux errants. Le premier indice vous sautera immédiatement aux yeux. Les villes du nord de la Serbie, y compris Belgrade, sont plutôt très propres, peut-être pas autant que Prague mais quand même un très bon niveau. Alors que Niš et les petites routes qui mènent jusqu’au Kosovo sont parsemées de détritus, de déchets en plastique et les rares poubelles débordent de partout. Le second indice est, pour ceux qui l’ignorent, le critère de développement préféré de mon ami Leonardo. Selon Leo, on peut rapidement se faire une idée du niveau de développement d’un pays ou d’une région au nombre d’animaux errants dans les villes (et dans les campagnes aussi mais surtout dans les villes). Je vous laisse méditer mais personnellement, je trouve que c’est un critère très pertinent et qui se confirme une fois de plus ici. Dans le sud de la Serbie, au Kosovo et ici à Skopje (pour ce que j’en ai vu jusqu’à présent), pas mal d’animaux errants, chiens et chats, se nourrissant dans les poubelles et quémandant parfois aux terrasses (la fin de ma « pizza kosovare » a fini dans l’estomac d’un toutou à Prizren). En rentrant chez moi hier ici à Skopje, pas moins de 9 chats autour d’une benne à ordures. Mon petit cœur se serre à chaque fois, inutile de vous le préciser.
Après une bonne douche et une nuit de 19h à 6h30, je suis apte à commencer la journée et à partir explorer Skopje. Je pars à pied, ce que j’ai filé au taxi suffira en budget transports à Skopje... Je passe par la Bohemian Street, plutôt calme en ce début de matinée. J’ai faim, et je ferais bien une infidélité à mon traditionnel burek-jogurt. Je tombe sur un genre de bar à smoothies, et engloutis un truc à base de bananes, de lait d’amande et de graines de chia. La boboïsation de Skopje est en marche... Je continue mon chemin, longe la forteresse, atterris dans le Vieux Bazar, vestige de l’époque de l’occupation ottomane. Les ruelles sont pleines de boutiques de souvenirs, de petites bijouteries, d’endroits où l’on peut boire le thé ou le café à la turque et de bars à shisha (qui figurent toujours dans le top 5 des endroits que je déteste le plus sur cette planète, je le rappelle). Collé au grand bazar, se trouve le marché. Bien bordélique comme on les aime. Au détour d’une ruelle, l’une des plus anciennes mosquées de la ville. Au détour d’une autre ruelle, la plus vieille église orthodoxe de la ville. Je redescends vers le mémorial construit en l’honneur de Mère Teresa (née à Skopje en 1910), arrive sur la place principale (aux proportions titanesques). Skopje est une ville à l’harmonie architecturale totalement inexistante. Se succèdent des petites ruelles d’inspiration orientale datant de l’époque ottomane, à des constructions gigantesques et bien lourdaudes de l’époque communiste et enfin des bâtiments plus modernes pas toujours du meilleur goût. Aucune harmonie donc, mais une architecture à l’image du pays : diverse et multiple. Je m’arrête dans un petit café pour prendre un thé, je tombe sur la première jeune femme qui ne parle pas anglais (les Macédoniens se défendent globalement plutôt pas mal sur ce point). Un mot d’ailleurs à propos de la langue. Elle me déconcerte quelque peu. Le macédonien est une langue slave, de la famille des langues slaves du sud, écrite en alphabet cyrillique. Elle a donc de grandes similitudes avec le BCMS (bosniaque-croate-monténégrin-serbe) et le bulgare, néanmoins elle forme une langue bien distincte. Si certains mots me semblent plutôt instinctifs, « zdravo » pour dire bonjour, « priatno » pour dire au revoir, dans l’ensemble je n’ai pas un immense feeling avec la langue. Mais je l’ai dit, tout le monde se débrouille très correctement en anglais.
Petit récapitulatif linguistique, géographique et historique (rapide, flippez pas). De l’ex-Yougoslavie sont nés aujourd’hui 6 états indépendants (Slovénie, Croatie, Monténégro, Serbie, Macédoine et Bosnie-Herzégovine) et un état dont l’indépendance est toujours contestée (le Kosovo). Nota bene : l’Albanie n’a jamais fait partie de la Yougoslavie. Tout ceci s’est étalé de 1991 à 2008 (avec plusieurs guerres et des dizaines de milliers de morts, et je ne parle même pas des personnes déplacées...). On distingue dans ces 6 pays et demi, 4 langues : le slovène, le BCMS, le macédonien et l’albanais (majoritaire au Kosovo). Entre le croate, le bosnien, le serbe et le monténégrin, il s’agit d’une seule et même langue. Comme toute langue, elle connaît des variantes d’accents, de prononciation et quelques mots de vocabulaire peuvent varier mais linguistiquement, c’est une seule et même langue. Les Serbes l’écrivent plus volontiers en alphabet cyrillique, là où les trois autres utilisent davantage l’alphabet latin mais vous trouvez l’alphabet latin partout également en Serbie. Toutes les personnes rencontrées dans ces quatre pays ont été unanimes : c’est la même langue, et l’intercompréhension se fait à 98% (pas sûre de pouvoir dire la même chose avec le français de Belgique, je plaisante Océ !). Enfin, il faut garder à l’esprit que les différences ont été ces 30 dernières années exacerbées par les différents courants nationalistes. Par conséquent, si certaines personnes vous disent qu’il ne s’agit pas de la même langue, il est préférable d’être conscient que ce sont davantage des considérations politiques que linguistiques. Pour terminer ce rapide topo, je citerai un des Serbes rencontrés pendant ce voyage « Les politiciens ont tout fait pour nous diviser, mais nous avons tant en commun ».
Après mon thé et avoir encore bien marché dans la ville, je m’accorde une pause dans un resto de kebabche. Rien à voir avec ce que l’on appelle un kebab, ici ce sont des boulettes de viande, servies avec des oignons crus et un genre de piment, du pain et de l’ajvar (la sauce à base de poivrons hachés plutôt relevée). Je décide ensuite l’estomac bien plein et en plein cagnard d’aller escalader la forteresse (Laurianne les bonnes idées, toujours). En haut de la forteresse, une petite photo prise par deux Madrilènes et on redescend. Après avoir encore bien exploré la ville en long en large et en travers, je décide de rentrer (une fois de plus l’orage gronde). Deuxième dodo bien mérité.
Samedi, j’avais rendez-vous à 10h avec Jovan, un mec de Couchsurfing qui m’avait gentiment proposé une balade dans la ville. Après avoir essayé d’acheter un genre de chausson aux pommes avec des dinars serbes (tout est mélangé dans mon portefeuille c’est le gros bordel), je retrouve Jovan sur la place principale. Il me fait faire un petit tour du centre-ville avec les explications qui vont bien et on part dans le vieux bazar prendre un thé (servi exactement comme à Istanbul). On se dirige ensuite vers un parc pour avoir un peu de fraîcheur (il fait un bon 33 degrés aujourd’hui), on discute et quand mon estomac crie trop famine, on va manger dans la Bohemian Street. Jovan me redépose ensuite chez moi pour une petite sieste et passe me rechercher le soir en voiture pour aller prendre un verre avec ses amis. Je fais ainsi la connaissance de Kristijan, de Stefi et de son amie canadienne en visite chez elle, Janna. Kristijan a eu une réflexion sur le macédonien que je trouve tout à fait juste, donc je me permets de vous la partager. Il m’a dit que le macédonien était au serbe et au bulgare ce que le catalan est à l’espagnol et au français. Proche, mais tout de même une langue à part. Après un verre, une bonne rigolade et une petite balade, Jovan me redépose très gentiment chez moi (je précise qu’il n’a bu que de l’eau, archi fiable le garçon). Kristijan prend mon numéro parce qu’il est possible qu’il vienne à Ohrid dans les jours qui viennent, donc on se reverra peut-être. Gros dodo.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire