mercredi 11 octobre 2017

Parler le belge : belgicismes et autres expressions insolites

Avant toute chose, petit topo linguistique à propos de la Belgique. Il y a en effet trois langues officielles en Belgique et pas seulement deux comme on le pense souvent. Tout d'abord le néerlandais (souvent appelé "flamand" en raison d'un accent différent) parlé par 59% de la population environ ; le français (agrémenté de quelques particularités comme nous le verrons plus loin...), parlé par 40% de la population, mais aussi l'allemand (très minoritaire, seulement 74 500 personnes). 
Voilà pour les trois langues officielles, mais il y a aussi une longue liste de dialectes et patois régionaux, parmi lesquels le brabançon, le champenois, le flamand oriental, le wallon, le francique rhénan, etc. Seule la Région de Bruxelles-Capitale est officiellement bilingue français-néerlandais. 

Maintenant que le décor est posé, intéressons-nous d'un peu plus près au français de Belgique, c'est-à-dire aux diverses expressions, différences de vocabulaire et de prononciation entre le français parlé en France et celui parlé outre-Ardennes. 



Il y a tout d'abord ces différences que l'on connaît tous, même sans avoir jamais mis un pied en Belgique. On reconnaît un Belge parce qu'il utilise le verbe "savoir" là où un Français utiliserait le verbe "pouvoir". Exemple : "J'ai trop mangé, je ne sais plus rien avaler !". Parfois, ça sonne plutôt bien, parfois un peu cocasse. A un monsieur qui me disait "Je ne sais pas avancer" parce que le bus était bondé, j'ai eu envie de répondre "Vous mettez un pied devant l'autre et vous marchez". 

Il y a aussi bien sûr, les nombres et la manière de compter. Un Belge dira "septante" là où nous disons "soixante-dix" et "nonante" pour "quatre-vingt-dix". Sur ce point, je me dois de reconnaître que la manière belge ne manque pas d'une certaine logique, cependant la logique ne va pas jusqu'au bout puisque nous tombons d'accord pour dire "quatre-vingt" (80) là où les Suisses osent le "huitante". Cependant, même après trois mois en Belgique, je continue à dire spontanément "soixante-dix" et "quatre-vingt-dix" et pas moyen de dire que je suis née en "mille neuf cent nonante et un". NO WAY. 
Sur la manière de compter, il faut aussi noter une différence de prononciation. Les Belges disent "houit" pour 8 au lieu de "huit" (ils disent aussi "nouit" pour "nuit") et ils prononcent le T de vingt (pour ça, il semblerait que ça ait traversé la frontière et que les Français de certaines régions du nord fassent de même). Mais ça n'a pas dépassé les Ardennes. 

Et après il y a toutes les différences de vocabulaire, allant de celles qui sont un mot que l'on peut deviner, à une utilisation qui prête à confusion, jusqu'au mot tout simplement impossible à deviner. 

Au rayon des "mots différents mais facilement compréhensibles" :
- parquer la voiture = garer la voiture
- ça donne bien = ça rend bien
- le tapis = le papier peint (sur le moment, j'avoue avoir cru que ma pote pensait réellement accrocher un tapis à son mur. Et après j'ai compris.)
- l'essui = la serviette de toilette (Au moment où j'écris ça, mon ordinateur me souligne "essui" en rouge et me le corrige automatiquement en "essai". Mon ordinateur ne parle pas le belge, que voulez-vous). 
Mais ATTENTION, n'essuyez pas votre vaisselle avec le torchon, car ici, c'est la serpillière !
Et si vous voulez "prendre les poussières" de votre étagère, il vous faudra vous munir d'une loque (un chiffon). Je n'aurais jamais pensé que faire le ménage puisse être aussi compliqué. 
- taper = mettre, poser (Tu tapes tes ordures dans la poubelle. Je sais que le système des poubelles est particulièrement exaspérant mais tout de même, tant de violence...).
- l'emploi de "fort" au lieu de "très". Exemple : Il fait fort chaud aujourd'hui. L'emploi de "fort" existait jadis en France, mais est totalement tombé en désuétude. 
- des griffes ou des grattes = des rayures
- sonner = appeler, téléphoner
- mousser = monter en pression, s'énerver (la bière est la boisson nationale, inutile de le rappeler). 



Ensuite, on passe au rayon des "mots qu'on utilise aussi en France mais qui ne veulent pas dire la même chose et du coup on se retrouve dans un quiproquo total où plus personne ne comprend de quoi on parle"
- un GSM = un téléphone portable (en France, on dit souvent "un portable" ce qui ici désigne l'ordinateur portable). Au début, j'avoue avoir cru que GSM désignait le GPS...
- au rayon des confiseries de votre supermarché, vous risquez aussi d'avoir quelques soucis. Une "chique" désigne un chewing-gum, SAUF à Liège, où le mot désigne un bonbon. Et ce que les Liégeois appellent un bonbon, c'est toutes les friandises genre Mars, Twix & co. 
- "Je te dis quoi" = expression immortalisée dans le film "Bienvenue chez les Ch'tis" puisque l'expression est utilisée aussi dans le nord de la France. C'est l'équivalent de "Je te dis ce qu'il en est". Mais ça peut prêter à confusion (cf. le film). 

Et enfin, il y a les mots et expressions qui me semblent impossibles à deviner pour un non-initié
- la drache = la pluie (ah là aussi, mon ordinateur me signale qu'il ne connaît pas). Je crois cependant que l'expression existe aussi dans le Nord. 
- la souche = le ticket de caisse. Si, si. 
- les crolles = les boucles
- un baraki = un plouc
- un chicon = une endive, mais là aussi les gens du Nord ("qui ont dans le coeur le soleil qu'ils n'ont pas dehors", ça suffit Enrico) le disent également. 

Et enfin, il y a tous les mots importés du néerlandais et utilisés par les Belges francophones. Par exemple, dans l'argot bruxellois, un dikke nek (littéralement, un "gros cou"), c'est un vantard assez pathétique, quelqu'un qui a la "grosse tête" et "une grande gueule". 

Evidemment, selon la région de France dont vous êtes originaire, selon la région de Belgique dont votre interlocuteur est originaire, les expressions peuvent vous sembler plus ou moins familières, ou plus ou moins insolites. Je compare principalement à partir de Paris. 

Je vous laisse pour ce soir avec une de ces expressions belges dont on se demande ce qu'elle peut bien vouloir dire quand on ne l'a jamais entendue. "Avoir un oeuf à peler avec quelqu'un". 

"Bob" en Belgique, c'est l'équivalent de notre "Sam" en France, c'est-à-dire lors d'une soirée entre amis, celui qui ne boit pas d'alcool et est chargé de conduire pour rentrer. En France, SAM signifie "Sans Accident Mortel". En Belgique, l'abréviation vient de trois mots néerlandais. Mais peu importe comment on l'appelle, il reste toujours le seul à devoir prendre le volant !

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