dimanche 20 août 2017

Bac+12 Poubelle ou pourquoi le système des déchets à Bruxelles est une vaste plaisanterie

Je vous arrête tout de suite, loin de moi l'idée de vouloir me moquer des Belges gratuitement, sans raison et juste pour perpétuer la tradition française des "blagues belges", rarement flatteuses pour nos amis d'outre-Ardennes. (A ce propos, ils en ont aussi sur nous, mais on en reparlera). Si je viens ici vous faire part de ma surprise, de mon scepticisme et enfin de mon intime conviction que le système est à chier, c'est parce que après trois semaines de vie ici et moult problèmes avec mes poubelles, le tout appuyé par des récits de mes amis belges qui dépassent l'entendement, c'est parce qu'il me semble avoir pointé un réel dysfonctionnement, du moins des failles, dans le système des ordures belge. 

Commençons d'abord par le commencement. J'ai loué pour mes trois mois de vie bruxelloise un appartement sur Airbnb. (Pitié, épargnez-moi le couplet du "Mais c'est cher, tu aurais pu trouver moins cher en coloc, blabla", j'ai pesé le pour et le contre, si j'ai choisi ça, j'ai mes raisons, merci). Bref, j'ai donc loué un appartement sur Airbnb. Comme pour chaque location sur ce site, j'ai accepté les "règles de l'appartement", à savoir principalement, pas d'animaux et respecter le tri des déchets en vigueur en Belgique. J'ai donc laissé mon Bounet adoré aux bons soins de Nico et m'étais gentiment préparée à reproduire le système de tri que j'applique déjà à Paris, à savoir trier verre/plastiques/autres et basta. 

Quelle ne fut pas ma surprise, en arrivant dans l'appartement et en voyant placardées dans la cuisine, pas moins de trois feuilles dimension A4 couvertes d'indications sur comment trier ses poubelles. En ouvrant le placard sous l'évier, je découvre une superbe collection de sacs poubelles en tous genres, tellement riche en couleurs qu'elle ferait passer le drapeau LGBT pour un peu pâlot. 
Je commence donc à lire attentivement la Bible du tri des déchets sur le placard et constate avec stupeur et un début d'effroi, qu'il faut trier ses déchets entre 6 poubelles différentes. Vous avez bien lu, 6 poubelles différentes. Bon déjà, heureusement que l'appartement est relativement grand et la cuisine d'une dimension raisonnable, parce que j'aimerais bien voir six poubelles différentes dans un appartement étudiant de la taille de ceux que je louais quand j'avais 20 ans. 

Je commence donc à détailler les différentes caractéristiques des 6 poubelles. 
- Premièrement, la bleue, poubelle dédiée a priori aux "bouteilles en plastique, métal et cartons à boissons". Déjà un peu surprise de mélanger le plastique et le métal, mais admettons... 
- Deuxièmement, la jaune, intitulée "papiers-cartons". Merde, je croyais que les cartons c'était dans la bleue. Mais en fait nan, juste les cartons à boissons, qui visiblement sont d'une race de cartons différente. Ok...
-Troisièmement, la verte, destinée aux "déchets de jardin". J'ai pas de jardin, ça devrait régler le problème. A moins que...
- Quatrièmement, la poubelle qui n'a pas de sac, le verre. Donc en gros pour le verre, il n'y a pas de sac, personne ne passe le ramasser, tu prends tes petites jambes et tu te tapes le kilomètre qui te sépare des bornes de collecte de verre, où tu auras encore le loisir de faire la distinction entre verre transparent et verre coloré... Nota bene : si tu es une petite grand-mère qui a du mal à se déplacer, tu ne bois ni vin ni bière (même en Belgique), et tu oublies la confiture et les cornichons. Putain... J'ai mis deux semaines à découvrir où se cachaient les bornes de collecte de verre et on a fait une expédition avec Léa pour se débarrasser de nos pots de sauce tomate. 
- Cinquièmement, la blanche. C'est là que ce système déjà un peu complexe a commencé à devenir franchement tordu. Alors le blanc, c'est ce que je qualifierais de "autres" à Paris, en gros tout ce qui ne rentre pas dans les poubelles précédentes, sauf qu'ici c'est en plus certains emballages en plastique dont tu aurais raisonnablement pu supposer qu'ils iraient dans la poubelle bleue. Bordel les gars, du plastique c'est du plastique. Je ne vois pas comment un emballage de filets de poulet en plastique est plus différent d'une bouteille d'eau qu'une boîte de conserve. Mais selon les Belges, si. 
- Last but not least, la orange. Le sac orange, c'est censé être le "compost", en gros tous les déchets alimentaires, mais attention, pas les oeufs ni la viande, juste les épluchures de légumes et de fruits, et pas non plus les fleurs fanées qui elles, iront dans la poubelle verte. Faudra m'expliquer sur le plan biologique, la différence entre un trognon de pomme et une rose fanée, les deux sont biodégradables, arrêtez le délire. J'ai pu constater avec un petit sourire en coin, que la propriétaire de l'appartement (française) avait d'ores et déjà abandonné l'idée du sac orange puisqu'il n'y en a pas sous l'évier, en mode "j'veux bien être gentille mais faut pas pousser non plus". 

Jusque là me direz-vous, bon ça peut encore aller. Passé le fait que c'est une perte d'espace de dingue d'avoir six poubelles dans sa cuisine, qu'il faut se taper une rando pour aller jeter son verre et que leur logique de tri est passablement discutable, ça pouvait encore éventuellement se faire. 



Mais c'était sans compter sur le reste du système. Et le début de mon effroi a commencé quand je me suis aperçue qu'il n'y avait pas de poubelles d'immeuble. Je répète, il n'y a pas de poubelles d'immeuble. Vous savez, ces grosses poubelles où l'on entasse plusieurs sacs avant que les éboueurs ne passent. Pour les immeubles, elles sont en général dans le local poubelles ou dans la cour, et pour les maisons individuelles, dans le garage ou dans un coin du jardin. Ce qui veut donc dire que vous ne pouvez vous débarrasser de vos sacs poubelles (à savoir, les sortir de votre appartement) que lorsque les éboueurs passent. Et ils passent deux fois par semaine. Deux fois par semaine, ça peut de prime abord sembler raisonnable, mais quand vous avez une peau de banane déjà bien avancée ou une écorce de melon en stade de décomposition, je vous laisse imaginer le parfum d'intérieur que vous vous tapez dans votre cuisine/appartement. A ma plus grande joie, je n'aime pas le poisson ni les fruits de mer, mais sinon clairement, vous pouvez oublier les crevettes sous peine d'asphyxie en attendant les éboueurs. 

Je disais donc, ils passent deux fois par semaine, et encore deux fois c'est uniquement deux fois pour les sacs blancs, les autres c'est une fois par semaine uniquement. Je vous laisse imaginer l'odeur d'un sac de compost au bout d'une semaine... (Sachant qu'il faut déjà avoir le coeur bien accroché pour tenter le compost dans un appartement). 
Dans les faits, la veille du jour où les éboueurs daignent venir te débarrasser de tes ordures malodorantes, tu dois déposer ton sac poubelle sur le trottoir (je déconne pas, tu déposes ton sac poubelle à même le trottoir) et prier le ciel pour avoir bien trié tes déchets, sinon ils te le laissent. Je ne plaisante pas, comme les sacs sont intentionnellement plutôt transparents, ils peuvent rapidement voir si tu t'es planté dans le tri des déchets et si tel est le cas, ils ne le ramassent pas. Et si tu persistes à mettre ton emballage de poulet en plastique avec ta bouteille de lait, ils peuvent même te coller une amende

La première fois, on a donc foutu nos sacs poubelles sur le trottoir devant notre porte avec la trouille de se choper une amende, mais pour l'instant il semblerait qu'on ait passé avec succès les partiels en vue d'obtenir notre bac+12 poubelle. 

Le côté ubuesque du système des ordures belge ne s'arrête pas là. Déjà, et vous avez probablement dû le noter, qui a eu l'idée à la con de décréter qu'il fallait déposer ses sacs poubelles à même le sol dans la rue ? Rien de tel pour attirer les animaux (chiens, chats, oiseaux et d'autres moins désirables comme les rats), qui s'empresseront d'éventrer le sac poubelle à la recherche de quelque chose à manger. Comme les animaux en Belgique répondent aux mêmes instincts primaires que n'importe où dans le monde, vous retrouvez régulièrement des déchets qui traînent sur le trottoir, résidus d'un sac poubelle éventré pendant la nuit. Si on faisait ça à Paris, c'est l'invasion de rats en trois jours. 

Je ne parle même pas de ce que j'évoquais plus haut, à savoir qu'ils vous laissent votre poubelle s'ils estiment qu'elle est mal triée, ça fait déjà trois jours que la poubelle de mes voisins traîne sur le trottoir, pour l'aspect hygiénique et esthétique, on repassera. Enfin, et comme me l'a fait remarquer mon collègue italien, vu la météo de merde qu'il y a dans ce pays (la fameuse "drache nationale"), quand vous laissez votre sac de papiers-cartons sur le trottoir toute la nuit, il y a de fortes chances de le récupérer "tutto bagnato", bref, trempé et donc en train de se désagréger. 

J'ai donc un brocoli complètement pourri qui empeste toute ma cuisine, et comme je ne veux pas me taper la même chose avec les peaux de banane dans deux jours, je virerai donc mes sacs poubelles à moitié vides ce soir. C'est ça, ou se farcir les moucherons et l'odeur pestilentielle en permanence. On notera l'illogisme du truc, consommer encore plus de sacs poubelles (en plastique), puisque vous n'avez qu'une hâte, c'est libérer votre appartement de ce truc. 

Ayant évoqué le sujet avec deux de mes amies belges, toutes deux sensibles à la cause environnementale et à la défense du particularisme belge face au voisin français (on reparlera du French-bashing en temps voulu), on en est tout de même arrivées à des extrémités dépassant l'entendement. Tandis que je leur demandais comment ils faisaient quand ils mangeaient du poisson, des fruits de mer ou des choses naturellement malodorantes, l'une m'a répondu l'air presque honteux, qu'elle se débarrassait alors de son sac dans une poubelle publique et l'autre me répondait que sa mère congelait ses déchets jusqu'au jour de passage des éboueurs...

Je vous laisse méditer sur ces subterfuges pour survivre à l'infection de ses poubelles et je ne résiste pas à l'envie de rappeler aux autorités belges qu'avant toute considération d'écologie et de recyclage, le ramassage des ordures et l'utilisation de poubelles avaient deux objectifs incontournables : l'hygiène et la salubrité publiques. 


lundi 7 août 2017

Bulgarie 2017 : Les tombeaux thraces et autres curiosités de la Vallée des Roses

Jeudi 6 juillet 2017

Ca fait déjà un moment que je n’ai pas écrit. Mardi matin, nous avons quitté les montagnes des Rhodopes pour nous rendre à Plovdiv, deuxième ville du pays. Celle qui s’est appelé tour à tour Poneropolis, puis Philippopolis, puis Pulpudeva, puis Trimontium et enfin Plovdiv voit son histoire remonter à plus de 6 000 ans, elle est donc aussi vieille que Rome et Athènes, même si son importance est moindre. On y arrive après avoir fait un petit détour par la forteresse d’Assen, forteresse byzantine du IXème siècle. A Plovdiv, on séjourne à l’hôtel Odéon, à l’entrée de la vieille ville. Après avoir abandonné la voiture sur un parking payant et sécurisé pour deux jours, nous partons explorer la vieille ville à pied et surtout, commencer par nous restaurer. On commence par se casser le nez sur une adresse du Routard qui de toute évidence, n’existe plus… et on met finalement le cap sur une autre. On mange dans un petit jardin ombragé et une partie de mon repas termine (malgré l’interdiction affichée du resto) dans l’estomac d’un petit chat affamé. Après notre déjeuner tardif, on part visiter le théâtre romain, construit au IIème siècle de notre ère durant le règne de Trajan. 7 000 places quand même et il est encore utilisé aujourd’hui, il a d’ailleurs accueilli Placebo au cours du mois de juin. Après une petite glace en terrasse, quelques informations glanées à l’office du tourisme et quelques cartes postales achetées, nous décidons de participer au Free Plovdiv Tour. Même concept qu’à Sofia, une visite guidée de la ville dispensée par un habitant (en l’occurrence, une habitante), on paie le montant que l’on veut. Notre guide du jour s’appelle Tsveta (Fleur), elle parle très bien anglais mais aussi français, elle est très intéressante, et une fois de plus, je réponds à deux de ses questions et récolte donc les petits bonbons « oignons » qui servent de récompense. Pas de panique, ça n’a pas un goût d’oignon, ça a un goût de menthe et c’est juste la forme et la couleur qui leur ont donné ce surnom. A la fin de la visite, on remercie chaleureusement notre guide et elle nous conseille un petit restaurant dans le quartier de Kapana, le quartier « branché » et « hipster » de Plovdiv si je puis dire. Nico goûte finalement à la truite, souvent à la carte des restaurants ici. Le lendemain, après une bonne nuit dans le lit incroyablement large de notre hôtel, on décide de faire la visite des différentes « maisons » de commerçants, maisons à encorbellements construites sur le modèle ottoman mais décorées souvent à l’européenne (faux colombages, etc.). On se décide finalement pour le billet groupé et on commence par celle réputée la plus impressionnante, la maison de Stepan Hindliyan. Riche marchand d’origine arménienne, il aurait gagné son surnom (l’Indien) en allant commercer jusqu’en Inde. Il était tellement riche et souhaitait tellement que tout le monde le sache, qu’il avait fait installer dans son salon une fontaine d’où coulait de l’huile de rose (denrée chère et précieuse à cette époque). Il avait aussi fait installer dans sa maison une salle de bains privée à l’époque où les bains étaient publics. La maison est effectivement très belle, richement décorée et meublée. On continue avec la maison Balabanov, la maison Nikola Nedkovitch, la pharmacie Hippocrate, la mosquée Djoumaia, etc. On se repose un peu à l’hôtel avant d’aller prendre un verre dans le quartier de Kapana, à un charmant petit café avec canapés et fauteuils en terrasse. Alors que je suis plongée dans le Guide du Routard, je suis accostée par une Française qui me dit « Bonjour, vous êtes français ? _ Oui. _ Vous aussi, vous avez du mal à trouver les choses ici ? _ De ouf ! ». On avait galéré comme c’est pas permis pour trouver les différentes choses que l’on voulait visiter. S’en suit une conversation qui s’achèvera près de 5 heures plus tard, après une tournée supplémentaire, une balade dans la vieille ville et un dîner au restaurant. Agés d’une cinquantaine d’années, Philippe et Laurence avaient beaucoup voyagé, étaient vraiment charmants et nous avons passé une très agréable soirée en leur compagnie.

Ce matin, nous avons quitté Plovdiv pour nous diriger vers Kazanlak, la vallée des Roses et les tombeaux thraces. On visite le tombeau de Seuthès III, grand roi thrace des Odrisses (331-300 avant JC), contemporain d’Alexandre le Grand. Les tombeaux thraces sont aujourd’hui des tumuli recouverts par la végétation, on y pénètre par un petit couloir d’environ 13 mètres de long, trois chambres successives dont la deuxième est circulaire et voûtée. La dernière salle servait de sarcophage.
Après le tombeau, nous sommes allés à Chipka, le village le plus proche où l’on a pu admirer la magnifique église russe construite en 1903 en hommage aux soldats russes morts pendant la guerre russo-turque qui libéra la Bulgarie du joug ottoman. L’église est absolument magnifique et aves ses bulbes dorés, on la repère de loin !
Enfin, Nico y tenait, nous avons fait un détour par le désormais célèbre monument de Bouzloudja, l’énorme bâtiment communiste aujourd’hui à l’abandon. On dirait qu’une soucoupe volante a atterri là. Là aussi, on le repère de très, TRÈS loin. Le bâtiment tombe en ruines, les portes en ont été barricadées par les autorités, des panneaux indiquant (en bulgare) « Interdit d’entrer, danger pour votre vie, etc. » ne dissuadent pas certains touristes de se glisser dans un trou à quelques mètres du mur du bâtiment pour aller en explorer l’intérieur. Nul doute que ce doit être très impressionnant, cependant aux dernières nouvelles l’escalier principal du truc menaçait à tout moment de s’effondrer et quand les autorités bulgares (pourtant souvent peu regardantes sur la sécurité et pas aussi parano que leurs homologues françaises) me disent que c’est dangereux, je ne cherche pas à y aller absolument. J’en ai dissuadé Nicolas (difficilement…), vous n’aurez donc pas de photos de l’intérieur mais vous en trouverez très facilement sur Google.

(…) Nous sommes déjà rentrés depuis plusieurs jours, il a été très difficile pour moi de tenir ce journal pendant ce voyage en raison principalement de nos déplacements en voiture qui ne sont pas les plus adaptés pour écrire sur un ordinateur (je profite généralement du train pour le tenir à jour).


Pour terminer notre voyage, nous avons dormi à Kazanlak, dans un hôtel plutôt sympa, et le lendemain, sur les conseils de plusieurs personnes, nous sommes allés passer la journée à Veliko Tarnovo pour visiter la citadelle-forteresse du Tsarevets. C’est très beau, et ça valait vraiment le détour. On a mangé deux délicieuses pizzas dans un resto en terrasse avec une vue magnifique avant de reprendre la route pour Sofia. Notre dernier hôtel était à quelques kilomètres seulement de l’aéroport. Nous avons passé notre dernier soirée au centre ville de Sofia, et sommes allés manger dans le resto qui était complet lorsque nous y étions allés au début du séjour. Très beau décor, on a passé une très belle dernière soirée, avant de se lever aux aurores pour rentrer à Paris. On garde un magnifique souvenir de la Bulgarie, et tout particulièrement de ses montagnes, de ses paysages verdoyants et de ses forêts. Pour les amoureux de la nature et les randonneurs aguerris, il y a de merveilleux itinéraires à découvrir !